Mais ces histoires de "journalisme objectif" c'est le même problème que "l'historien objectif.
Des fois pour rigoler je dis à des historiens : "mais tu te rends compte que l'Histoire est un mensonge ?"
Et là , stupeur : "bah non on fait de la science, donc on parle de vérité".
Oui... mais pas simple. C'est un regard analytique sur des traces du passé que tu portes. Pour quels objectifs ? Pour raconter quoi ? C'est toi qui va agencer ces traces et leur donner du sens, de manière subjective. Mais quelles valeurs te guident ? Avec qui tu vas faire collectif pour atteindre un consensus scientifique ?
C'est par là qu'il faut commencer, assumer un regard analytique et subjectif. La vérité, on sait qu'on ne l'atteindra jamais.
Un consensus d'analyses subjectives permet de progresser pour exprimer "des vérités" et des fragments d'image de la réalité. (Et je parle bien d'une image et pas de la réalité.) Rien de plus.
Et dire cela, c'est pas dire "n'importe quel con peut dire n'importe quoi + tout se vaut", mais remettre sa pratique à sa place.
C'est parce qu'on assume d'exister et de faire de l'Histoire et du journalisme de manière critique et réflexive qu'on apporte quelque chose à l'humanité.
Pas en se prenant pour une sorte de cerveau abstrait qui serait une machine à produire du "fait" et du "vrai", en fait c'est le meilleur moyen d'ignorer ses biais (ce qui est un comble).
Et c'est là que j'invite les scientifiques à s'intéresser à l'art : la science, c'est une narration, on saisit comme dans l'art ce qui paraît et disparaît. On cherche ce qui se cache est ne sera jamais accessible. On rapporte un peu, on s'en sert pour nos intérêts, et rien de plus.